Poussin et Moïse, du dessin à la tapisserie… !
L'exposition Poussin et Moïse, (du dessin à la tapisserie) à la Galerie du Musée des Beaux Arts de Bordeaux, a présenté pour la première fois en France la tenture complète de L'Histoire de Moïse, d'après Nicolas Poussin (1594-1665) et Charles Le Brun (1619-1690). Les tapisseries sont de grandes dimensions (environ 4m sur 6) et sont en laine et soie rehaussées d'or. Dès 1683, les ateliers royaux de la manufacture des Gobelins entreprennent la réalisation de la nouvelle tapisserie sur l'histoire de Moïse à partir de huit tableaux de Nicolas Poussin,
alors considéré comme le plus grand peintre français et de deux de Charles Le Brun,Premier peintre du Roi : Le Buisson ardent et Le Serpent d’airain.
Le serpent d’airain est peint par Charles Le Brun entre 1649 et 1650, pour son ami le collectionneur Le Noir, il est conservé à Bristol. Les dix tapisseries, de cette prestigieuse commande royale ont été prêtées par le Mobilier National et représentent :
Moïse exposé sur les eaux - Moïse sauvé des eaux - Moïse enfant foulant aux pieds la couronne de Pharaon - Le Buisson ardent - Moïse changeant en serpent la verge d’Aaron - Le Passage de la mer Rouge - La Manne dans le désert - Le Frappement du rocher - L’Adoration du veau d’or et Le Serpent d’airain .
La tapisserie intitulée Moïse changeant la verge d’Aaron en serpent a été confectionnée à la manufacture des Gobelins dans l’atelier de Jean Lefebvre en 1685.
Elle est tissée en haute-lisse, de laine et soie rehaussée d’or. Elle a pour modèle une huile sur toile de Nicolas Poussin, peinte après 1645 et conservée au musée du Louvre.
Dans ce passage du livre de l’Exode, Moïse veut convaincre Pharaon de laisser sortir son peuple d'Égypte. Pour prouver que cette requête provient de Dieu, il change en serpent le bâton de son frère Aaron devant Pharaon et ses prêtres.
Ceux-ci parviennent à faire la même chose grâce à la magie, mais leurs serpents sont aussitôt dévorés par celui de Moïse. Dans le tableau de Poussin, l’affrontement entre puissance divine et croyances païennes est traduit visuellement par une composition symétrique claire et rigoureuse.
Pharaon se tient à gauche, assis sur un trône et entouré de sa cour. Au centre, les serpents des prêtres sont dévorés par celui de Moïse.
Tout à droite, face à Pharaon, Moïse et Aaron désignent les serpents tout en levant un doigt vers le ciel, pour expliquer que ceci est l’œuvre de Dieu.
Les gestes et les expressions sont extrêmement lisibles, traduisant ainsi la surprise ou l’indignation des magiciens, et l’assurance de Moïse et Aaron. Cette œuvre témoigne également d’un goût prononcé pour la reconstitution historique :
le grand bâton tenu par un des prêtres est par exemple un "tau "surmonté d’un ibis noir et blanc égyptien. En un curieux mélange, l’imposante architecture du fond, le mobilier et les vêtements sont au contraire d’inspiration grecque et romaine.
(Moïse enfant foulant aux pieds la couronne de Pharaon)
La tapisserie reproduit le thème du tableau de Nicolas Poussin peint en 1647,
a été tissée à la manufacture des Gobelins par l’atelier de Jean Jans fils en 1685.
D’après le texte de l’historien Flavius Josèphe, Moïse est sauvé des eaux par la fille du Pharaon. Un jour, elle amène Moïse, alors tout jeune enfant, à son père. Elle annonce à ce dernier qu’elle songe à faire de Moïse son fils et l’héritier du royaume.
Elle met l’enfant entre les bras de Pharaon, qui pose son diadème sur la tête de Moïse, mais Moïse jette le diadème à terre et le piétine. A ce spectacle, le Grand prêtre reconnaît l’enfant qui entraînera l’abaissement de la puissance égyptienne et il se précipite pour le tuer.
Poussin place cette scène dans la pénombre du palais, devant d’imposantes tentures.
Un groupe d’hommes, à droite, se tient derrière Pharaon étendu sur un lit. À gauche, des demoiselles de compagnie entourent la fille de Pharaon, assise face à son père. C’est au centre que se déroule l’action : le prêtre, poignard levé, est sur le point de frapper Moïse.
Deux femmes sauvent l’enfant in extremis, l’une en retenant l’homme enragé, l’autre en s’emparant de l’enfant.
Les différences de traitement entre tableau et tapisserie se perçoivent facilement.
Un paysage est créé dans la partie supérieure gauche de la tapisserie tandis que la scène se déroule en huis clos dans le tableau. De même, le drapé jaune du fond, intraduisible dans la tapisserie, est devenu un rideau aux plis lourds, au dessin ornemental complexe et aux nombreuses variations de couleurs. Il n’est plus une paroi de fond, mais un élément bien présent de la composition.
(Le serpent d’airain)
Il s’agit de la deuxième tapisserie tissée d’après Charles Le Brun sur les 10 qui composent la tenture complète. La composition en est simple. Le peuple juif est harassé, décimé, apeuré.
Massés sur la droite, des hommes et des femmes supplient Moïse.
Bras levé dans sa toge rouge, en haut à gauche, celui-ci désigne un long serpent de bronze enroulé autour d’un arbre, destiné à sauver les siens.
Sources: Galerie Musée des Beaux Arts de Bordeaux.
De peur que ce billet par trop de détails devienne indigeste et encourage certains à fuir comme ils le font pour mes billets sur l’art contemporain, j’arrête là les explications en invitant les plus courageux ou curieux à visionner le montage vidéo photos. Afin de ne point altérer les coloris des tentures, l’éclairage était réduit et l’utilisation de flashs interdit, ce qui ne m'a pas facilité les prises de vues et peut expliquer la qualité médiocre des vidéos.